Un château abandonné par les hommes. Des animaux de la ferme qui s’en emparent et créent une république où tous seraient égaux. Égaux ? Non, pas vraiment, Égaux n’est pas le mot adéquat lorsque le pouvoir est détenu par une seule et même personne, le taureau Sylvio. Tyrannique, jupitérien arbitrairement, avide de pouvoir et de contrôle, mégalomane à l’extrême alors que son peuple, poules, chats, oies, canards et autres animaux de la ferme crèvent de faim, se tuent à la tâche pour assouvir sa soif de pouvoir.
Ça ne vous rappelle rien ? Outre les régimes totalitaires, du point de vue strictement littéraire La Ferme des animaux de Georges Orwell évidement. Un bel hommage que lui rendent ici Xavier Dorison et Félix Delep.
Portée par la voix de l’oie Marguerite la révolte contre ce régime totalitaire gronde, les animaux se soulèvent contre le pouvoir en place mais en vain. La soif de liberté ne vaut pas grand-chose contre les chiens de Sylvio, sa garde rapprochée. L’arrivée au château du Rat Azélar, artiste itinérant dont l’apparence et le discours ne sont pas sans rappeler Gandhi, ouvre aux insurgés une autre voie. Rien ne sert de se battre avec les poings, le rire et le ridicule tuent davantage que les coups. Une vraie menace pour le pouvoir en place qui tente de se débarrasser du saltimbanque par la force des crocs. Trop tard, le discours d’Azélar a déjà fait des émules, notamment auprès de Miss Bengalore, minette au pelage blanc qui élève seule ses deux chatons, et César le lapin, gigolo de profession qui le sauvent de la brigade canine . Tous deux bien décidés, malgré la peur de la répression, à faire valoir la voix du peuple, Miss Bengalore et César vont mener une campagne anonyme et non violente pour ridiculiser le pouvoir en place en érigeant Marguerite comme symbole de leur liberté.
Pour ma part je n’ai jamais été déçue du travail toujours bien ficelé et qui ne tombe pas dans le cliché de Dorison au scénario (Asgard, Comment faire fortune en juin 40, Undertaker…) et j’ai découvert le dessin tout en finesse de Félix Delep, ancien élève de l’école Émile Cohl. Ajoutez à cela que je suis une fan de BD anthropomorphiques comme Les Ailes du singe ou L’Épée d’Ardenois d’Étienne Willem pou ne citer que celles-ci, j’étais déjà en terrain conquis avant même de commencer Le Château des animaux ! Le reste n’a fait que confirmer mon premier jugement, n’oublions pas que comme La Ferme des animaux en son temps, Le Château des animaux a une portée malheureusement universelle et c’est en cela que c’est une GRANDE bande dessinée.